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Nice-Matin : La chronique des "Vies de Brian" de Brian Johnson

Issu des masses laborieuses, le chanteur d’AC/DC raconte avec gouaille dans une biographie sortie ce mercredi, ses jeunes années de galère avant le coup de fil des frères Young qui va sonner les cloches de sa gloire. Le chanteur qui enregistra dans le Var en 1987 et se produisit la dernière fois à Nice en 2010, évite soigneusement tout "règlement de comptes» sur l’épisode de son "éviction" en 2016.

Après celles de Bruce Dickinson (Iron Maiden) et Rob Halford (Judas Priest) déjà parues en France chez Talent éditions, la sortie ce mercredi d’une biographie du chanteur d’AC/DC fait figure d’événement. D’autant que bruisse ces jours-ci l’annonce d’une nouvelle tournée des Boys, privés de dates en 2020 avec un Power Up sous pandémie...

Bref, voici le bon pavé pour patienter et lever les interrogations autour de la "mise au placard" de Brian "Jonna" Johnson en 2016 pour cause de "surdité" ("Des gens m’avaient considéré comme bon pour la casse", écrit-il), avant sa réintégration en 2018.

Astucieusement, ce "coup dur" constitue le prologue "dramatique" de l’ouvrage. Nous sommes en plein Rock Or Bust World Tour et Brian s’aperçoit que quelque chose "cloche" au pays d’Hells Bells... L’épilogue du livre, lui, survient alors que Brian se réveille dans un lit d’hôpital après une opération des esgourdes dans un centre australien à Sydney. Juste en face d’où Malcom Young est traité pour "démence précoce" avant de décéder en 2017...

Entre ces deux passages, les vies d’un Brian qui se cherche à travers différents groupes en marge de son boulot au sein de Parsons, une usine de turbines à vapeur. Tous les épisodes sont narrés avec la gouaille caractéristique du chanteur qui ne s’embarrasse pas de figures de styles et la joue très mollo au chapitre "règlements de comptes". Seul Chuck Berry y passe. "Il ne faut jamais rencontrer ses héros" se désole-t-il.

Un second livre pour l’après Back In Black

 

Avertissement pour l’accro aux révélations AC/DCiennes, la saga se limite aux coulisses de l’enregistrement de Back In Black"Je réserve la suite pour un autre livre", glisse Brian narquois. Adieu donc anecdotes sur "la rançon de la gloire" ou gambades varoises dans les vignes de Miraval où fut enregistré Blow Up Your Video en 1987.

L’argent étant le nerf de la guerre pour le jeune Brian, nous suivons ses premiers "pas", ou plutôt sauts, au sein du régiment parachutiste où il s’engage pour avoir la prime de 200 livres qui lui permettra enfin d’acheter une sono digne de ce nom.

Très vite le récit se focalise sur les années Geordie, ce groupe initialement baptisé U.S.A., signé chez Red Bus/EMI, mais qui ne décolla jamais malgré quatre albums et une quinzaine de passages à l’émission phare de l’époque, Top of the Pops. Jonna raconte avec truculence le making of du show télé où il croisa la route de Michael Jackson alors "simple numéro" des Jackson 5.

Une fois Geordie coulé, Jonna revient avec... Geordie II, qui fait son beurre en reprenant des classiques ou Whole Lotta Rosie d’AC/DC dans les "clubs de travailleurs". Les cachets tombent enfin et Brian fonde en parallèle sa petite entreprise d’installation "de capotes en vinyle pour voitures".

Mais le vinyle qui va "décapoter" sa vie sera celui qu’Angus et Malcom vont lui proposer d’enregistrer suite à la mort de Bon Scott victime de ses excès.... "Dans le monde dans lequel je vivais, personne n‘avait d’argent pour s’acheter de la drogue, et on devait se lever au petit matin pour aller bosser", observe Brian, alors aussi incrédule face à une telle disparition qu’à la proposition des frères Young d’intégrer leur groupe.

"Je n’étais connu que dans mon quartier et je pensais qu’avec eux je boxais en dehors de ma catégorie", estime-t-il un brin défaitiste.

La seconde audition durant laquelle il décrit comment Malcom le lance sur les accords d’"un titre hommage à Bon", squelette de Back In Black, donne forcément des frissons au gamin qui acheta transi la galette à pochette noire en 1980.

Les doutes et la peur

"En l’espace d’un instant j’ai senti l’atmosphère changer autour de moi", note Brian qui devra pourtant se débattre avec une tonne de doutes avant de quitter sa "vie d’avant".

Il serait ici malvenu de dévoiler la fin du conte et les dessous de son intégration à lire avec délice. Quelques pistes tout de même. Brian avoue avoir eu de sérieuses pannes d’inspiration d’écriture durant les sessions studio et du mal à atteindre, à moins d’avoir "un troisième poumon", le chant haut perché demandé par le producteur Robert John "Mutt" Lange.

La rencontre avec la famille Scott endeuillée en Australie constitue un passage poignant tandis que Brian met les points sur les "i", Non, Bon Scott n’avait rien enregistré ou écrit avant de mourir pour ce qui allait devenir l’album le plus vendu de tous les temps (après le Thriller de Michael Jackson).

Vient en conclusion le concert "test" à Namur, en juin 1980... Brian confie retrouver cette drôle de sensation éprouvée, bidasse, lors de son premier saut en parachute. Cette fois il a bien fini en "torches". Sous celles des milliers de watts qui l’ont éclairé et mené au sommet en poursuivant l‘électrisante aventure.

 

Brian Johnson enfant

Un "Bon lutin" en 1re partie !

Bienvenue dans la vie d’une famille de Dunston, banlieue ouvrière de Newcastle, non loin d’où Mr Brian, aîné d’une fratrie de quatre, poussa son premier cria en 1947 d’une mère italienne douée pour la couture (comme en témoignent les premières tenues de scène du fiston, visibles dans le livret photographique !) et d’un papa sergent rescapé de la guerre, gueulard notoire employé dans une fonderie.

Comme nombre de petits gars de sa génération, la foudre lui est tombée dessus à onze ans, lorsqu’il a vu pour la première fois se trémousser Little Richard sur la BBC. « Mon rêve de devenir chanteur est né avec Tutti Frutti. C’est comme si on m’avait d’un coup branché sur le secteur », ose comme première métaphore AC/DCienne Brian.
Très vite il saisit l’opportunité pour chanter au sein des scouts marins puis dans la chorale de l’église avant de devenir « enfant acteur » sur la chaîne locale. Papa « trop jeune » à 19 ans, il jongle avec les impératifs familiaux, mais la musique prend irrémédiablement l’ascendant lorsqu’il voit Hendrix et Status Quo live en 67 et 69, puis se professionnalise avec le groupe Geordie (lire plus haut).

L’épisode cocasse survient lorsqu’un gang australien assure leur première partie à Torquay et Plymouth. "Leur chanteur était le lascar le plus sauvage que j’avais jamais vu, avec des cheveux à la Tahiti Bob (personnage des Simpson, Ndlr), une dent en moins et une barbe à la Abraham Lincoln. Il ressemblait à un lutin, mais bon sang qu’est qu’il pouvait chanter !", se souvient Brian. Le groupe en question était Fraternity (rebaptisé Fang sur cette tournée) et le "lascar" en question Bon Scott, se rendra compte des années plus tard son successeur.

"Je n’ai jamais revu Bon", se désole Brian qui découvrit aussi a posteriori qu’il eut comme "spectateurs de passage" les frères Young, Malcom et Angus, durant la tournée des clubs australiens de Geordie.

Si les Boys ont repensé à lui lors du décès de Bon Scott, c’est aussi parce que ce dernier leur avait parlé du grain de voix rock’n’roll de ce chanteur anglais avec qui il avait partagé la scène deux soirs dans le sud de l‘Angleterre.

Par Laurent Amalric pour Nice-Matin