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Arnaud Démare à Sud-Ouest : "Je me regarderai toujours en face".

Le sprinter de Groupama-FDJ retrace sa saison dans un livre où il confie ses doutes face à des "limitations de vitesse différentes". 

Il n'a "surtout pas voulu (se) positionner en porte-parole des coureurs dominés". Son livre, écrit en collaboration avec le journaliste de Ouest-France, Mathieu Coureau retrace avant tout une saison avec ses victoires (9 tout de même) et ses difficultés (pas de succès en World Tour) avec une grande sincérité. Une mise à nu rare pour un sportif en activité, qui plus est au sortir d’une saison qu’il préférera sans doute oublier. Mais au détour d’une page, Arnaud Démare a laissé parler ses sentiments, ses émotions d’un soir de défaite. C’était à Tignes, sur le Tour de France, ce jour où son rival sprinter Sonny Colbrelli volait dans la montagne, quand lui était éliminé, hors délais. Ces mots, l’ancien vainqueur de Milan-San Remo les a sortis comme ça. Mais il les a laissés, après les avoir soupesés.

"Prendre des cétones ?"

 

« Je me pose plein de questions. Qu’est-ce que je peux faire de plus ? […] Est-ce que je dois aller habiter à la montagne, grimper plus de cols à l’entraînement ? Prendre des cétones comme d’autres, ce qui est proscrit pour le moment dans notre équipe ? On a discuté de ça avec Jacopo (Guarnieri, son coéquipier). Après tout, ce n’est pas interdit. J’ai l’impression parfois de manger de la salade pendant que d’autres bouffent des pâtes. Et on doit faire la course ensemble. On n’aime pas parler de dopage ni des autres avec Jacopo, on se dit qu’on doit d’abord se concentrer sur nous. On ne sait pas si les cétones suffisent, ni comment ça marche. Mais ça parle dans le peloton. On sait que certains ont fait toute leur préparation avec ça, en altitude, qu’ils ont perdu trois kilos et qu’ils récupéraient mieux, que ça les poussait. On sait qu’il y a quelque chose, notamment chez les sprinters. L’année dernière, Ineos et les Jumbo se faisaient la guerre. Cette saison, plusieurs équipes sont au même niveau. On voit même des sprinteurs faire des performances inattendues en montagne, voire hallucinantes… »

Arnaud Démare a-t-il brisé la fameuse omerta ? Pris un risque pour la suite de sa carrière ? « Non, je n’ai rien brisé du tout. Je ne parle pas de dopage. Je dis juste que les limitations de vitesse sont différentes. Mais pour être franc, je ne pensais pas que ça ferait autant de bruit. »

Pour l’instant, le sprinter picard n’a pas eu de retours, ni en reproches, ni en remerciements. « Mais si derrière, certains veulent relayer ou continuer, pourquoi pas », sourit-il. En attendant, Arnaud Démare aimerait qu’on retienne cette vie de coureur cycliste, qu’il décrit sans fard. « On raconte souvent l’instant T de la victoire, mais rarement ce par quoi on passe. Et au-delà des succès, des défaites, j’espère que les lecteurs sauront se retrouver dans le fait qu’il ne faut jamais rien lâcher. Car si tout ne s’est pas passé comme je l’aurais aimé cette année, j’ai fini par une belle victoire, sur Paris-Tours. » Un succès moins prestigieux qu’une étape du Tour ou un Paris-Roubaix, mais Arnaud Démare semble l’accepter. « Je ne gagnerai jamais des dizaines d’étapes, je serai le champion que je serai, mais je me regarderai toujours en face. »